
Portrait of Paul Strand, by Alfred Stiglietz (1919)
Paul Strand est né à New York en octobre 1890. Ses parents l’inscrivent à l’école privée Ethical Culture FieldstonSchool où il aura la chance de suivre un cours de photographie donné par Lewis Hine, dont nous avons déjà présenté l’oeuvre. Lors d’un voyage de classe à la galerie de Stieglitz, organisé parLewis Hine, le jeune Paul Strand découvrira des artistes comme JuliaMargaret Cameron, Frederick H. Evans, Gertrude Kasebier, DavidOctavius Hill, Edward Steichen, Alfred Stieglitz et Clarence White.C’est à ce moment qu’il décide de consacrer sa vie à la
photographie. Lewis Hine ne le formera pas uniquement à la
photographie mais fera de lui un réel humaniste. Pendant sept ans,
il dédiera tout son temps à la photographie largement influencé
par le mouvement pictoraliste et s’inspirant d’artistes comme Edward
Steichen et Clarence White.
Il visite régulièrement Stieglitz, son mentor,
pour lui présenter ses photographies. Les critiques et
encouragements du maître enrichiront sa réflexion et le feront
progresser dans sa recherche esthétique. Ainsi, à partir de 1915,
Paul Strand s’éloignera du pictoralisme et adoptera une nouvelle
technique photographique en travaillant sur trois thèmes
principaux : le mouvement dans la ville, les abstractions et les
portraits pris dans la rue.
Les mouvements dans la ville

From the El, 1915 – Paul Strand (American, 1890–1976).
Platinum print; 13 ¼ x 10 3/16 in. (33.6 x 25.9 cm). Alfred
Stieglitz Collection, 1949 (49.55.221)
Pendant les années 1910, les photographies de
Strand des rues de New York étaient des photographies structurées
sur des mouvements lents, représentant le plus souvent une seule
personne comme nous pouvons l’observer sur cette photographie « From
the El ». L’objectif
photographique de Strand est de capturer le contraste entre la
rigueur urbaine new-yorkaise et la vie des personnes qui traversent
et habitent cette ville. Cette photographie est représentative de
cette volonté. La puissance des structures métalliques et des
ombres de la rue contrastent avec la petite taille du piéton
solitaire en haut à droite de l’image.
Les abstractions

Abstraction, Twin Lakes, Connecticut, 1916
Paul Strand – Silver–platinum print; 12 15/16 x 9 5/8 in. (32.8 x
24.4 cm)
Paul Strand est
largement influencé par les peintures exposées dans la galerie de
Stieglitz, « The Little Galleries of the
Photo-Secession », au 291
Fifth Avenue. C’est
Alfred Stieglitz qui
participera à l’introduction de l’art moderne en exposant pour la
première fois aux Etats-Unis des artistes comme Rodin, Matisse,
Cézanne et Picasso. Cette influence aura la conséquence de
déclencher chez Paul Strand une réflexion sur la construction d’une
image, la relation entre les formes des objets. Ainsi il appris à
créer de la profondeur et du mouvement dans l’univers compact qu’est
la photographie. Peu à peu, Strand abandonne le réel et les formes
reconnaissables en les remplaçant par des formes abstraites. Parmi
les photographies les plus représentatives de ce travail nous
pouvons citer « Abstraction, Twin Lakes,
Connecticut » prise en
1916. il s’agit de la première photographie de formes abstraites
prise intentionnellement.

Geometric Backyards, New York, 1917 Paul
Strand – Platinum print; 10 x 13 1/8 in. (25.4 x 33.3 cm)
Cette photographie
est la vue de la fenêtre de l’appartement familial de Paul Strand.
Une vue qu’il a pu observer pendant 24 ans, mais ce n’est qu’en 1917
qu’il voit réellement l’abstraction géométrique de cette
photographie et se rend compte que « New York est une
visible abstraction ».
Impressionné par
le travail de Strand, Stieglitz lui donne l’incroyable opportunité
d’exposer dans sa gallérie. Plusieurs de ses photos seront publiées
dans Camera Work, revue
créé par Alfred Stieglitz pour la promotion du pictoralisme. Pour
Stieglitz, les photos de Strand sont « l’expression
directe du temps présent. »
Les portraits
pris dans la rue

Blind, 1916 Paul Strand – Platinum
print; 13 3/8 x 10 1/8 in. (34 x 25.7 cm) Alfred Stieglitz
Collection, 1933 (33.43.334)
Paul Strand est
également connu par les portraits qu’il a effectué des habitants de
la ville de New York. Les personnes qu’il photographie sont
représentatives de la ville de New York à cette époque et plus
particulièrement de Five Points,
dans le Lower East Side, cœur des bidonvilles où vivaient les
immigrants. Il s’agit mendiants barbus, d’Irlandais, de patriarches
juifs, d’européens vieillissants, vendeurs ambulants aveugles et des
« hommes-sandwich ».
Les portraits de
Paul Strand des habitants de la ville de New York ont été pris
d’une manière très originale. Comme il souhaitait photographier des
personnes sans qu’elles en aient conscience, il a du mettre en place
un système ingénieux. Paul Strand a équipé son appareil photo
d’un faux objectif pour distraire la personne qu’il souhaitait
photographier. A l’approche de son sujet, Strand tournait de 90° en
dirigeant le faux objectif dans cette direction. Le vrai objectif sur
un soufflet, était coincé sous son bras et face à la personne.
Tout comme son professeur, Lewis W. Hine, Paul Strand documente la
pauvreté à New York et la condition humaine dans un contexte urbain
moderne.
Blind a été
publiée en 1917 dans le magazine Camera Work,
et est devenue immédiatement le symbole de la nouvelle photographie
américaine. Cette photographie représente à la fois l’objectivité
d’une photographie documentaire tout en gardant les lignes simples du
modernisme.

Harold Greengard, Twin Lakes, Connecticut,
1917 Paul Strand. Silver–platinum print; 10 x 13 in. (24.5 x 33 cm)
L’originalité des
photographies de Paul Strand est qu’il renonce à l’esthétique et
rejette toute forme de stylisation pour devenir l’un des premiers
photographes a promouvoir pleinement l’utilisation de la photographie
instantanée et naturelle ou « straight
photography ». Ce portrait
de son meilleur ami, Harold Greengard en est la parfaite
démonstration. La spontanéité de la photographie est évidente.
Dans
les décennies suivantes, Paul Strand s’intéressera à la création
de films. Ainsi, en 1920, avec Charles Sheeler, il réalisera son
premier court-métrage Manhatta.
Ils décrivent dans ce film muet le quotidien de la ville de New
York.

Rebecca, New York, ca. 1923 Paul Strand.
Palladium print; 7 5/8 x 9 11/16 in. (19.4 x 24.6 cm)
En 1922 il se marie
avec Rebecca Salsbury qu’il photographiera fréquemment dans un
environnement très intime et souvent de très près.

Seated man, Uruapan
de Progreso, Michoacan Mexico (1933)
Après son divorce,
il habite au Mexique entre 1932 et 1935. Sensible aux réformes
sociales de la révolution méxicaine et des artistes représentatifs
de l’époque comme Diego Rivera, il travaille sur le film Redes
(1936). Un mi-documentaire, mi-fiction commandité par le
gouvernement mexicain de l’époque sur une grêve de pêcheurs. Ce
film sera le premier film réalisé par Fred Zinnemann. Paul Strand
travaille également sur d’autres documentaires comme The
Plow That Broke the Plains
(1936) et Native Land (1942)
un film de dénonciation des violences de la police et de milices
privées travaillant pour le patronat et la défense des droits
civiques.
Il se remarie en
1935 avec Virginia Stevens de qui il divorce en 1949 et part
présenter Native Land au
Karlovy Vary International Film Festival en
Tchécoslovaquie où il sera récompensé.
En 1950 il emménage
en France avec sa troisième femme, Hazel Kingsbury et vivra jusqu’à
la fin de ses jours à Orgeval. C’est pendant cette dernière période
qu’il réalisa six livres photographiques : Time in
New England (1950), La
France de Profil (1952), Un
Paese (1955), Tir
a’Mhurain / Outer Hebrides
(1962), Living Egypt
(1969) et Ghana: an African portrait
(1976).

Young Boy Gondeville
France, (1951) – Paul Strand

Tailors apprentice, Luzzara
(1953) – Paul Strand

The family Luzzara, Italy (1953) – Paul
Strand

Young Ali,
Kalata el Kobra, Delta, Egypt (1959) – Paul Strand

Chief and Elders,
Nayagnia, Ghana (1976) – Paul Strand

Asena Wara, Leader of the Womens’ Party,
Wa Ghana (1976) – Paul Strand
Sources :